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La Libération de Frameries - Témoignage de M.A. DEBIÈVE

Le samedi 2 septembre vers 16h00, une rumeur se répand rapidement dans la rue Ferrer : « Les américains arrivent ». Les habitants sortent de leurs maisons, ils n’en croient pas leurs yeux, enfin après quatre dures années d’occupation, de privations voici la libération. Les drapeaux préparés en cachette depuis plusieurs jours se déploient aux fenêtres. Informés par Radio Londres, nous avions connaissance de l’avancée des troupes alliées.

Les chars américains arrivent par la rue Bois Bourdon, franchissent le pont du Berger, s’engagent dans la rue de Genly mais s’arrêtent indécis sur la route à suivre pour atteindre Mons via Jemappes selon le plan de bataille établi par le général Rose.

Un char prend position le long du terril canon pointé vers le haut de la rue au cas où les allemands viendraient les surprendre de ce côté. La foule entoure les libérateurs.

Un jeune homme, 23 ans, Max EYCKERMANS, étudiant à la Consul (institution qui, plus tard, portera le nom des FUCAM, puis UCL Mons) est monté sur le char et montre sur une carte au chef de la colonne la route à suivre pour atteindre Mons. 

La colonne blindée se remet en route par la rue de Genly laissant la foule en liesse faire des commentaires. 

Hélas, peu après, nous voyons une colonne motorisée allemande arriver par la rue Léon Defuisseaux. En un clin d’œil la rue se vide et les drapeaux enlevés des fenêtres précipitamment… Les allemands se sentant pris au piège veulent éviter l’encerclement et fuient vers Givry. Ils n’iront pas loin, une arrière-garde américaine située dans la rue Bois Bourdon tient sous son feu le bas de la rue Ferrer bien dégagée à l’époque car la cité Floréal n’était pas construite. Les premiers éléments de la colonne allemande se font détruire. La colonne s’arrête et stationne un long moment le long du terril de l’Agrappe.

Cachés dans la cave nous entendons les officiers allemands discuter avant de prendre une décision. Mon père ancien déporté en Allemagne pendant la Guerre 14-18 comprend un peu, il en est de même pour l’étudiant Max EYCKERMANS (réfractaire au travail obligatoire en Allemagne, se cachant de la police allemande, il vivait chez nous). Aucun des deux ne font part de ce qu’ils comprennent à la famille repliée dans l’escalier conduisant à la cave. A un certain moment la colonne descend et va se masser au-delà du pont du Berger, entre le carrefour de la rue Bois Bourdon et jusqu’aux dernière maisons de la rue Ferrer ; elle est protégée du feu américain par ces maisons.

La nuit tombe, peut- être les allemands pensaient-ils s’échapper à la faveur de l’obscurité, mais les américains veillent, toute fuite avec les véhicules est impossible...  A un certain moment une énorme explosion retenti, toute la maison tremble, mon père entrouvre la porte et regarde dans la rue, la partie de la rue Ferrer où stationnaient les allemands est en feu ; ils ont fait sauter toute la colonne. Inconscients, mon père et Max sont montés en haut du terril et ont pu voir le désastre. Nous saurons le lendemain que les allemands avaient laissé dans les camions leurs blessés qui périront carbonisés …

Les soldats allemands encore valides ont fui par les prairies à gauche de la rue Ferrer. (Pendant l’occupation elle avait changé de nom et s’appelait rue des ducs de Bourgogne). Les maisons de part et d’autre de la rue sont fortement endommagée, une jeune fille perdra la vue. 

Le lendemain, dimanche, aux Quatre Pavés, il y eu aussi des combats et des destructions . 

Dans les jours qui ont suivi une colonne blindée américaine remonta la rue Ferrer le long du terril, un campement avait été installé dans les prairies le long de la rue Joseph Wauters. Mon père n’a pas pu faire de photos car la Military Police l’interdisait absolument, il n’a pu photographier que leur départ. 

Des prisonniers allemands ont été évacués par camion, ils semblaient heureux de leur sort, ils étaient vivants… 

Dans le courant du mois, un matin, nous avons eu la surprise de voir des prisonniers allemands descendre la rue Ferrer, ils partaient pour un camp d’internement. Très disciplinés, ils marchaient aux pas vraisemblablement encadrés par leurs sous- officiers. Des injures leur furent adressées. Cette troupe était encadrée par des soldats américains. 

Les photos ont été prises par Auguste Debiève, ancien déporté de la Guerre 14-18 d’abord à Münster puis ensuite sur le front de la Somme, en France à Marquion. A la libération, il était chef de train (accompagnateur) à la SNCB.

Des festivités eu lieu à Frameries pour fêter la libération, des farandoles endiablées se sont déroulées sur la grand place au son de la musique.

M. André DEBIEVE

29 décembre 2020